AIGUILLOUS
Aiguillous ou salettes, son nom, peu nous importe.
Arêtes délitées et murailles croulantes,
Il n’a rien d’un grand pic aux formes élégantes,
Mais vers lui, ce beau jour, un bel élan nous porte.
Au fil des méandres d’une sente rugueuse,
Nous partons conquérir notre olympe d’un jour,
Le sac lourd d’un espoir de triomphal retour,
Au soir d’une journée harassante et glorieuse.
Quelques lambeaux de brume, éphémères voiliers,
Montent de la vallée, glissent sur les alpages.
Silencieux et furtifs, embryons de nuages,
Ils voguent, lumineux, le vent pour timonier.
Sur l’alpe débonnaire ou l’éboulis croulant,
Sous la fraîcheur du vent ou l’ardeur du soleil,
Nous imprimons nos pas, le regard en éveil
Sur le caillou glissant ou le rocher branlant.
Sur la vague du temps, nous marchons sans efforts
Jusqu’au rude pierrier où des traces d’isards
Nous montent à ce grand col attirant nos regards.
Lentement, il grandit, du Campbieilh voici le port.
Les Aiguillous au nord, un terrain torturé
Fait d’arêtes disloquées, épaves miséreuses
De cimes où jadis, des pointes audacieuses
Egratignaient le ciel de leurs dents acérées.
Dans ce chaos pierreux, ignoré des troupeaux
Ce grand champ de ruines d’une pointe en lambeaux
Impuissante, domptée par le gel et les eaux,
Nous grimpons, souffle court, sans l’ombre d’un repos.
Un petit pas de plus, vient l’instant du bonheur.
Un fin voile bleuté flotte sur l’horizon,
Créant à l’infini cet irréel gazon
D’un jardin fabuleux où les monts seraient des fleurs.
Sur ce panorama, nos regards se promènent.
Vignemale, Posets, colosses éternels,
Palas et tant d’autres, nul ne manque à l’appel.
Ces instants de bonheur justifient bien nos peines.
G H